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À Gori, la visite du musée Staline

Une découverte du musée Staline inauguré en 1957 dans sa ville natale en Géorgie. Un musée resté dans son jus, pour plonger au cœur de la propagande soviétique.

Vue sur des salles du musée Staline à Gori (Géorgie), avec au premier plan un portrait de Staline
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Lecture : 10 min

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Le 06/09/2025

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Le 06/09/2025

Nichée entre la mer Noire et les montagnes du Caucase, la Géorgie est un petit pays riche en Histoire, souvent méconnu des voyageurs européens. À une heure de route de Tbilissi, la ville de Gori se distingue par un patrimoine singulier : elle est le lieu de naissance de Joseph Staline ! C’est dans sa ville natale qu’a été fondé un musée à sa gloire, devenu aujourd’hui une curiosité historique majeure.

Dans cet article, je vous emmène découvrir le musée Staline de Gori. Un musée étonnant inauguré en 1957 et resté dans son jus depuis. Un musée peu critique, qui vaut surtout pour être resté un témoignage de à quoi pouvait ressembler la propagande soviétique à l’époque.

Gori, la ville natale de Staline

Située au centre de la Géorgie, à environ 80 kilomètres à l’ouest de Tbilissi, Gori occupe une position stratégique en Géorgie. La ville est située au cœur de la plaine de Kartlie intérieure, traversée par la rivière Mtkvari.

Gori est une petite ville d’environ 45 000 habitants, connue pour son rôle militaire et politique tout au long de l’histoire géorgienne. Dominée par une forteresse médiévale perchée sur un promontoire rocheux, Gori a longtemps servi de point de contrôle des routes reliant l’est et l’ouest de la Géorgie.

L’histoire de Gori est marquée par les invasions successives : Perses, Turcs, Mongols et Russes ont tour à tour occupé ou détruit la ville. La forteresse actuelle, bien que partiellement en ruines, rappelle cette fonction défensive. Récemment encore (en 2008), la ville fut le théâtre d’une guerre entre la Russie et la Géorgie à propos notamment de l’Ossétie du sud, située à une dizaine de kilomètres à peine de Gori.

Mais ce qui a fait la renommée internationale de Gori reste surtout sa dimension symbolique : en effet, Gori est la ville natale de Joseph Staline. Cette origine a profondément marqué l’identité de Gori au 20e siècle, la ville devenant un lieu de mémoire pour les autorités soviétiques. Le musée qui lui est consacré en est l’illustration la plus connue, mais d’autres traces de ce passé sont visibles un peu partout dans la ville.

La proximité de Gori avec le site troglodytique d’Uplistsikhé en fait aussi une étape intéressante lors d’un voyage en Géorgie. Voir les offres de circuits combinés sur GetYourGuide.

Le parc Staline de Gori, avec en arrière-plan le musée Staline
Le parc Staline de Gori, avec en arrière-plan le musée Staline

Le musée Staline : un vestige envahissant de l’ère soviétique

Impossible de venir jusqu’à Gori sans y faire un tour : je parle du musée Staline de Gori, bien sûr !

Inauguré en 1957, quatre ans après la mort du dirigeant soviétique, le musée Staline à Gori occupe une place centrale dans la ville. Le musée est installé dans un imposant bâtiment de style stalinien, construit dès 1951, officiellement pour devenir un musée de l’histoire du socialisme.

L’architecture du bâtiment ne laisse aucun doute sur la nature du lieu : colonnades massives, marbre, escaliers monumentaux… Il est conçu pour impressionner et refléter la grandeur supposée du personnage.

La création de ce musée répondait à la volonté de perpétuer le culte de la personnalité de Staline, toujours puissant à cette époque malgré les premières critiques du régime. Il s’agissait aussi de construire un lieu de pèlerinage idéologique, destiné à glorifier les origines modestes du « petit père des peuples » et à célébrer ses « exploits » politiques et militaires.

Aujourd’hui encore, le musée Staline à Gori reste largement tel qu’il a été pensé à l’époque soviétique. Il constitue à ce titre un témoin brut de l’histoire de la propagande, autant qu’un lieu de mémoire.

Vue sur l'une des salles d'exposition du musée Staline à Gori (Géorgie)
Les salles d’exposition du musée Staline à Gori sont restées dans leur jus, depuis la création du musée en 1957

Un musée resté dans le jus de la propagande soviétique

Après avoir acheté mon billet dans le grand hall d’entrée, la visite du musée débute à l’étage. Surprise : contrairement à ce que j’avais pu lire, aucune visite guidée ne semble proposée. Apparemment, il y en aurait toujours, mais ce serait assez aléatoire. En tout cas, avant d’entrer, on me demande mon pays d’origine pour tenir des statistiques. Peut-être cela aidera-t-il à prévoir à l’avenir davantage de visites pour les voyageurs étrangers…

À l’étage, la visite débute par une succession de quelques grandes salles en enfilade. Elles sont organisées de manière chronologique, retraçant la vie de Staline depuis sa jeunesse (l’occasion pour moi de découvrir des portraits de Staline jeune : on est plus habitué à la version moustachue de l’après-guerre) jusqu’à sa mort en 1953.

Les objets présentés sont nombreux : photos officielles, lettres manuscrites, effets personnels, statues, bustes et peintures en tout genre… l’occasion d’exalter le parcours du dirigeant.

Au bout du bâtiment, on accède ensuite à la salle la plus impressionnante du musée : celle qui expose l’un des douze exemplaires du masque mortuaire de Staline conservés dans le monde. La mise en scène est solennelle.

Vient ensuite (la visite est assez rapide) la dernière salle du musée : celle des cadeaux officiels. On y trouve toute une série d’objets improbables offerts à Staline par des chefs d’État ou des délégations communistes du monde entier. Bien entendu, tous vantent le petit père des peuples

Dommage, tout au long du musée, les explications (en anglais, mais même en géorgien) sont extrêmement lacunaires. En l’absence de visite guidée, la visite est brute et dans son jus : le parcours n’a presque pas changé depuis son inauguration en 1957. Mais c’est aussi pour ça qu’on vient à Gori : pour voir un tel témoignage brut de l’Histoire.

Tout au long du parcours, le musée Staline ne s’encombre d’aucun recul critique sur le totalitarisme stalinien, dont la Géorgie a pourtant bien souffert.

Vue sur l'un des douze masques mortuaires de Staline, exposé au musée Staline à Gori (Géorgie)
Le musée de Gori expose l’un des douze masques mortuaires de Joseph Staline, dans une salle à l’aménagement solennel

À voir aussi devant le musée Staline à Gori

D’autres vestiges de Joseph Staline, l’enfant du pays, sont également visibles devant son musée à Gori. Ils font partie intégrante du circuit de visite.

La maison natale de Staline

Devant le bâtiment principal du musée trône une maison en briques et en bois, protégée par une structure néoclassique à colonnes (ornée de marteaux et de faucilles, bien sûr). Ce modeste logis d’une pièce est la maison natale de Joseph Djougachvili, futur Staline, né en 1878 à Gori. À l’époque, son père était cordonnier et la famille vivait dans une grande pauvreté. La maisonnette est authentique, conservée dans son état d’origine.

La structure qui l’abrite, construite dans les années 1930, en dit long sur la manière dont le régime soviétique a entretenu le culte de la personnalité. La bâtisse est presque sanctuarisée, comme un artefact sacré de l’histoire révolutionnaire. On ne peut pas entrer dans la maison, mais on peut librement faire le tour de la maison à l’extérieur (sans avoir besoin d’un billet pour le musée Staline, contrairement au wagon blindé).

La maison natale de Staline à Gori constitue l’un des rares lieux de mémoire soviétique encore debout dans son format d’origine, en dehors de la Russie.

La maison natale de Staline, né à Gori en 1878, est fièrement exposée en face du musée
La maison natale de Staline, né à Gori en 1878, est fièrement exposée en face du musée

Le wagon blindé de Staline

Un peu en retrait, derrière le musée principal, se trouve un impressionnant wagon blindé vert olive. Ce wagon ferroviaire, qui appartenait à Staline, est une pièce phare de la visite. C’est à bord de ce wagon protégé qu’il a effectué de nombreux déplacements à travers l’URSS et jusqu’à Yalta, lors de la célèbre conférence de 1945 avec Churchill et Roosevelt.

Muni d’un billet pour le musée, on peut visiter l’intérieur du wagon blindé de Staline. Il comprend une chambre spartiate, un salon de travail, une salle de bain en marbre, et même un système de ventilation d’époque. Le tout est conservé dans un état remarquable, comme figé dans les années 1940.

Le choix du train n’avait rien de folklorique : Staline souffrait d’une peur panique de l’avion. Il préférait voyager lentement mais à l’abri des risques aériens, avec des mesures de sécurité draconiennes.

Vue extérieure du wagon blindé de Staline, exposé au musée Staline à Gori (Géorgie)
Le billet d’entrée au musée Staline à Gori permet également de visiter l’intérieur du wagon blindé de Staline

L’ancienne statue de Staline (déboulonnée)

Jusqu’en 2010, Gori pouvait aussi s’enorgueillir d’abriter l’une des dernières statues monumentales de Staline dans le monde. Haute de plus six mètres et érigée en 1952, la statue de bronze était placée en évidence devant l’hôtel de ville de Gori, au bout de l’Avenue Staline (celle qui longe le Parc Staline, devant le musée Staline… vous voyez le genre !…).

En juin 2010, deux après la guerre avec la Russie en Ossétie du sud (où des combats eurent lieu à Gori), les autorités géorgiennes décident finalement de déboulonner l’encombrante statue de Staline. En prenant tout de même la précaution de mener l’opération de nuit, afin d’éviter les protestations…

L’ancienne statue de Staline à Gori aurait été stockée dans un entrepôt municipal, avec le projet un jour de la réinstaller au musée Staline, ou ailleurs à Gori dans le cadre d’un « parc des statues » à vocation mémorielle. Un projet qui n’a toujours pas vu le jour…

Des photos des conflits récents, dont l'occupation de Gori en 2008 par les Russes, exposées dans une petite salle au rez-de-chaussée du musée
Des photos des conflits récents, dont l’occupation de Gori en 2008 par les Russes, exposées dans une petite salle au rez-de-chaussée du musée

Le musée Staline aujourd’hui : entre mémoire et controverse

Depuis l’indépendance de la Géorgie en 1991, le musée Staline suscite d’importants débats et controverses au sein de la population géorgienne : faut-il conserver le musée sans en réviser le discours ? doit-on le transformer en musée critique du totalitarisme ? À Gori, les avis sont partagés…

Une partie de la population reste attachée à la mémoire du dictateur comme figure historique née en Géorgie, tandis que d’autres militent pour une recontextualisation complète. C’est d’autant plus le cas depuis la guerre russo-géorgienne de 2008 (au cours de laquelle Gori a été envahie par les chars russes : une mini-exposition revient sur cet épisode au rez-de-chaussée du musée), puis après l’invasion de l’Ukraine en 2022.

C’est dans ce contexte qu’un projet de refonte du musée avait été annoncé en 2010. Mais sans jamais aboutir. Aujourd’hui, le musée reste quasiment intact dans son contenu. Quelques panneaux explicatifs en anglais, ajoutés récemment, évoquent les crimes de Staline, mais ils restent discrets (par exemple, une vitrine mentionne « les victimes du régime soviétique », mais se contente d’une dizaine de photos de personnalités…). Le reste des salles demeure fidèle à l’héritage soviétique d’origine.

Malgré ce flou mémoriel, le musée attire un nombre croissant de visiteurs curieux, historiens amateurs ou simples voyageurs de passage. À l’heure où les monuments de l’époque soviétique disparaissent progressivement, le musée Staline de Gori conserve une valeur documentaire unique.

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Informations pratiques

  • Le musée Staline est ouvert tous les jours de l’année, sauf le 1er janvier et le jour de Pâques. Du 1er novembre au 1er avril, le musée Staline de Gori est ouvert de 10h à 17h ; le reste de l’année, de 10h à 18h.
  • Le billet d’entrée au musée Staline coûte 15 GEL (environ 5€ – tarif 2025). Gratuit pour les enfants de moins de 6 ans.
  • Compter environ 1h de visite. Peu d’explications sont disponibles sur les panneaux, et les visites guidées semblent très aléatoires…
  • Gori est facilement accessible en marchroutka depuis Tbilissi (environ 1h de trajet, départs fréquents depuis la gare de Didube). Possible également en train (mais un peu moins pratique), ou via un circuit organisé (voir les activités vers Gori sur GetYourGuide).

Cet article a été rédigé sur la base d’un voyage effectué en juin 2025.

Voyager à Gori : fiche pratique

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